Avec les légendes celtes, nous voguons toujours entre le réel et l’irréel, l’ombre et la lumière le fantastique et le divin….
Le Roi Marc, les Chevaliers de la table Ronde, Tristan et Iseult…sont les plus connus, mais bien d’autres existent !.....
Je vais vous raconter aujourd’hui, la surprenante histoire de Berthe au grand pied, où légende et réalité se confondent.
Lorsque Pépin le Bref, décida de prendre épouse, des émissaires furent envoyés dans plusieurs pays à la recherche d’une épouse de bonne noblesse. Mais le roi de parvenait pas à être satisfait.
Un jour un trouvère s’arrêta au château, il avait parcouru une bonne partie du monde et chantait les mérites d’une très belle et très douce jeune fille, aussi intelligente que fine et sage…. Elle s’appelait Berthe et était la fille du Roi de Hongrie.
Pépin lui demanda, pourquoi cette merveille n’était toujours pas mariée ? Le trouvère du se résoudre à lui avouer qu’elle avait un défaut ….
Un de ses pieds…mais un seul, était trop grand……
Pépin réfléchit un instant …. Ses pieds restent cachés sous la robe ! …….Puis déclara : Qu’on amène donc Berthe à Paris !
Il fit charger trente chevaux d’or et d’argent, équipa une douzaine de chevaliers le plus richement du monde qui partirent vers la Hongrie.
Berthe n’était guère enthousiaste de quitter son pays, mais sa mère Blanchefleur la réconforta :
- Ma chère enfant, c’est dans la douce France que tu t’en vas, où trouveras-tu plus beau pays au monde ? Nous ne t’oublierons jamais !
C’est ainsi que Berthe partit pour la France. En chemin le convoi s’arrêta au château du duc de Mayence, qui s’étonna de la grande ressemble qui existait entre Berthe et sa propre fille Alista. Seuls les pieds les différenciaient, ceux d’Alista étaient si petits que l’on eut dit ceux d’une fillette.
Personne ne s’étonna que les deux demoiselles se prennent très vite d’amitié, au point que Berthe demande à Alista de devenir sa suivante et de l’emmener avec elle à la cour de France.
Mais la route était encore très longue et Berthe se sentant lasse en arrivant à Paris, fit cette proposition à Alista :
- Chère Alista, ce soir, on me présente au Roi, peux-tu me remplacer, personne ne verra rien, ….Nous nous ressemblons tellement !
Alista accepta très volontiers.
Elle s’apprêta, se coiffa et revêtit la plus belle robe de Berthe.
Ainsi parée, elle se rendit à la salle de réception pour la grande cérémonie de présentation.
Tout le monde s’émerveillait de sa beauté et de sa grâce. Pépin n’avait d’yeux que pour elle et la soirée fut parfaite…
Si parfaite qu’Alista décida de continuer à jouer ce rôle et de remplacer définitivement Berthe.
Pour cela, elle paya très, très cher deux serviteurs qui enlevèrent Berthe au matin et l’emmenèrent en secret dans une épaisse forêt.
Ils avaient ordre de la tuer, mais eurent pitié d’elle, devant tant de beauté, ils l’abandonnèrent et s’en retournèrent à Paris.
La pauvre Berthe erra longtemps dans cette forêt.
Un jour elle arriva dans une clairière, devant une petite chaumière. Elle était affamée, les jambes en sang par les épines et les ronces. Epuisée, elle frappa à la porte. Elle fut accueillie par le charbonnier Simon, qui vivait là avec sa femme et ses deux filles.
C’est ainsi que Berthe vécut neuf ans et demi, dans cette cabane, sans jamais dire qui elle était.
Berthe aurait pu finir ainsi sa vie loin du monde…
Mais c’était sans compter sur obstination de Blanchefleur, sa mère.
Dès qu’elle avait l’occasion, elle envoyait des messages en terre de France, et était inquiète de ne recevoir en réponse que quelques mots brefs.
Alista, et on le comprend aisément, se devait de rester évasive.
Mais un jour, la reine de Hongrie invita sa fille à venir la voir…Alista prétexta une maladie qui l’empêchait de voyager.
Blanchefleur décida sur le champ de venir à Paris….Elle ferait le voyage, elle irait voir sa fille, et elle saurait ce qui se passe !
Rien pas même son époux ne l’en dissuaderait !
Et elle se mit en route.
En apprenant cela, Alista eut très peur et elle s’alita sans manger, ni boire dans une chambre sombre aux rideaux tirés, jusqu’à l’arrivée de Blanchefleur.
C’est ainsi que la reine de Hongrie trouva ce qu’elle croyait être sa fille. Elle prit la jeune femme dans ses bras, l’embrassa et la caressa comme l’on ferait d’un enfant malade ……
Mais bientôt, elle remarque que celle qui était dans le lit, avait le visage de sa fille mais avait aussi de tous petits pieds.
Elle s’écarta vivement en s’écriant :
- Tu n’es pas ma fille !
Et elle courut raconter au roi cette stupéfiante découverte.
Pépin le Bref se mit dans une effroyable colère et fit avouer à Alista sa supercherie, puis il fit venir les deux serviteurs.
Le roi voulut tout d’abord les exécuter, puis lorsque ceux-ci lui annoncèrent qu’ils avaient laissé la vie à Berthe, Pépin les emprisonna.
Le roi fit rechercher Berthe par tous les hommes disponibles dans la région et alla lui-même par monts et par vaux à sa recherche…C’est ainsi qu’il arriva à son tour devant la chaumière du charbonnier Simon.
Il aperçu une très belle jeune femme qui rapportait une cruche d’eau de la fontaine, il l’observa un instant….Elle avec un grand sabot….juste un seul !
Il se précipita, et la jeune femme prit peur.
- Qui êtes-vous ?
- Suivez-moi…Je suis le roi de France !
La pauvre Berthe répondit :
- Ah ! Mon bon Sire, ne me faites pas de mal ! Je suis la vraie reine de France, la fille du roi de Hongrie, l’épouse de Pépin !
Pépin tout heureux, lui répondit :
- Et Pépin, c’est moi !
Il prit Berthe sur son cheval et ils repartirent pour Paris.
Toute cette histoire se finit bien :
Berthe plaida en faveur de tous et Pépin le Bref pardonna.
Seule Alista fut honteusement chassée de Paris.
Les deux serviteurs furent bâtonnés, puis récompensés car ils n’avaient pas tuer Berthe comme ils le devaient, quant au Charbonnier qui ne réalisait toujours pas qu’il avait hébergé la reine de France pendant près de dix ans, il fut élevé au rang de chevalier et reçu pour armoiries une fleur d’or sur champ d’azur.
Peu de temps après furent célébrées les noces de Berthe et de Pépin.
Ils vécurent heureux de nombreuses années et régnèrent avec sagesse sur le beau et doux pays appelé France.
De ce bonheur naquit un enfant qu’ils baptisèrent :
Charlemagne…
Nous devons au troubadour Adenet le Roi, un conte celte :
Il s’inspira de cette histoire pour écrire :
« Li Roumans de Berte aus grans piés «
Pour l’histoire :
Berthe ou Bertrade dite au grand pied, fille de Caribert II ou Charibert, comte de Laon et de Gisèle d’ Aquitaine.
Epouse Pépin le Bref en 743-744.
Elle est la mère de Charlemagne et de Carloman.
Décédée le 12 juin 783 à Choisy-au-Bac, près de Compiègne.
Elle est inhumée en l’église de l’abbaye royale de Saint-Denis.
Bonne journée et à bientôt pour une autre histoire…….
Yvonne Delisle