Une fumée épaisse envahit soudainement l’espace.
Mamigoz suffoqua quelques secondes.
La machine venait de s’arrêter tout net.
Elle en avait marre de ce jeu stupide,
Elle voulait juste sortir….mais elle était coincée à l’intérieur.
Il allait en entendre le Tacoz !
Cette fois elle était à bout, elle n’en supportera pas d’avantage…
D’un coup de pied rageur, elle ouvrit enfin cette porte qui la retenait prisonnière.
La stupeur, figea littéralement Mamigoz sur place.
Elle était là, statufiée dans un environnement hostile.
Devant ses yeux écarquillés, pas de salon, pas de Tacoz, mais à la place une forêt de fougères arborescentes, peuplée d’animaux gigantesques, de bruits bizarres.
Elle reconnaissait ce décor, c’était celui de Jurassique Park….Plus de doute, elle rêvait, elle cauchemardait tout au plus. Soudain, elle aperçut comme une clairière…Elle prit sa valise verte et hâta le pas vers ce qui semblait être un peu plus humain dans cet environnement hostile.
Elle devina bientôt au milieu de la verdure, une grotte. Elle scruta attentivement les alentours….. Pas de monstres en vue.
Elle s’approcha encore un peu et aperçut enfin, un feu qui éclairait le fond de cette grotte. Elle avait froid, ce n’est qu’en voyant ce signe de civilisation, qu’elle s’en rendit compte. Elle grelotta en entrant et s’assit près de ce petit feu, qu’elle alimenta aussitôt de quelques branchages posés tout à côté….
Mamigoz un peu ragaillardie par la chaleur, observait cette grotte. Dans un coin, des os, de gros os. La pénombre livrant lentement ses secrets, elle sursauta …Il y avait là ce qui ressemblait à une de ces coques qu’elle avait souvent vue dans l’atelier de son cousin - qui était charpentier de marine - ainsi que dans les cimetières marins en Bretagne. Ces dépouilles de bateaux chargés d’histoire, qui n’en finissent pas de mourir. Ce spectacle qui la dérangeait depuis toujours, elle le retrouvait soudain dans cette grotte.
Elle s’en approcha tout de même.
S’il y avait bateau, il y avait forcément quelqu’un pour le construire.
Elle posa la main dessus, ce n’était pas du bois….des os, encore des os !
Dieu que cet animal devait être grand !
C’est alors qu’ un craquement la fit sursauter.
Derrière elle se tenait une sorte de Yéti.
Mamigoz ne voyait que sa silhouette haute et trapue se détacher en contre jour. La bête émit un râlement rauque.
Mamigoz tétanisée ferma les yeux….
Elle respira à fond ….Elle devait se réveiller, maintenant, là tout de suite ! Mais rien n’y faisait, elle était toujours dans son cauchemar.
Le monstre s’approchait d’elle, il la reniflait.
Mamigoz, se lassa tomber dans une sorte de torpeur.
Lorsqu’elle reprit ses esprits, elle était à terre et ce monstre la traînait par la coiffe.
Il fit entendre un rugissement, qui eut pour effet de rassembler autour d’eux, une meute de son genre.
Enfin, il lâcha prise. Mamigoz se releva, redressa sa coiffe, épousseta son beau costume, et se mit à parler en breton, invoquant tous les saints du paradis à la rescousse.
Elle pouvait les voir maintenant à la lumière du jour.
Il ne s’agissait nullement d’animaux mais de drôles de choses, mi-bêtes, mi-hommes, vêtues de peau de bêtes. Ils grommelaient plus qu’ils ne parlaient. Ils formaient une tribu….une famille ?
Le regard de Mamigoz fut attiré par un jeune, à l’écart.
Il était triste. Des traces de larmes sur son visage crasseux, avaient laissées des sillons rosés. Notre Mamy s’approcha, le petit se recula, méfiant. Il boitillait, il souffrait ne posant qu’avec peine son pied nu sur le sol empierré.
Mamigoz retourna dans la grotte toute proche et en ressortit, tenant à la main sa valise verte.
Elle l’ouvrit devant les yeux médusés de ce qui devait être des femmes…. Leur curiosité, plus forte que leur crainte, les fit s’attrouper autour de cette malle aux trésors.
Mamigoz, fouilla dans sa petite trousse et en sortit une petite pince à épiler. Pendant ce temps les femmes sortaient les vêtements de la valise. Intriguées tout d’abord par leur aspect, elles ne tardèrent pas à les mettre autour de leur cou, cachant ainsi leurs colliers de petits cailloux percés, enfilés sur une lanière de cuir.
Elle fit signe au petit de venir et de donner son pied…Il était subjugué lui aussi par le contenu de la valise et approcha sans crainte.
En un clin d’œil Mamigoz ôta l’écharde.
Le petit lui sourit et retourna vers sa mère, il ne boitait plus.
Mamigoz offrit la pince magique à celui qui semblait être le chef et qui l’avait si rudement baladée dans le village.
En souriant il lui dit
- Moi….Kromignon !
- Mamigoz….Et je voudrais bien retrouver mon armoire !
Le petit qu’elle venait de soigner, lui fit signe de le suivre.
Derrière un buisson touffu, son armoire était là, certes, un peu abîmée, la corniche de travers, la porte dégondée.
Kromignon remboîta la corniche et fit signe à Mamigoz de regagner sa place.
Une fois installée, il referma la porte. Celle-ci grinça bien un peu. D’un seul coup de massue, il l'emboita.
Mamigoz pouvait repartir dans son temps.
Tacoz ne lui avait donné guère de renseignements sur la programmation de cette machine.
Elle remit la manette sur la position retour maison…
Mais rien n’y faisait. La machine restait muette.
De son côté Tacoz paniquait !
Qui lui ferait à manger ce soir ? Demain …..et les jours suivants.
Il regrettait déjà les bons petits plats de Mamigoz….et même ses rides, maintenant !
Il prit le téléphone et appela Tugdual à l’aide.
- T’inquiète Papy. Laisse-moi faire !
Il brancha son ordinateur portable sur ce qui semblait être un tableau de commandes….pianota quelques données. Et souriant, s’adressa à Tacoz….
- Appuie sur START, maintenant Papy!
Tacoz ne se fit pas prier.
Presque instantanément, une fumée blanche sortit l’armoire.
Un tambourinement rassurant venait de l’intérieur.
Tacoz se précipita pour ouvrir la porte.
Notre Mamigoz était de retour !
Poussiéreuse, la coiffe pliée, mais là et bien là.
Elle était si contente qu’elle ne songea même pas à rouspéter Tacoz. Elle se dirigea vers la salle de bain et n’en ressortit qu’un long moment après, toute propre et souriante.
Tacoz hasarda un petit :
- Que s’est-il passé ?.....
- Rien ! …….Tu ne me croirais pas !
- Et ta valise verte ?
- Offerte à la femme de Kromignon !
Tacoz venait de comprendre qu’il était inutile de poser des questions. Mamigoz gardait son calme….pour l’instant….et c’était bien là le principal !
Et vous qui avez été témoin de cette mésaventure, la croyez-vous ?
Pensez-vous qu’une armoire puisse avoir le don ambigüité et traverser l’espace temps ?
Bonne journée