(Récits et légendes)
Bonjour
Cette nuit : Clair de Lune. !
Les fils se montrent sous l'égide d' Hélène
de Croix de lune.
Je vais y ajouter un petit fil vert magique et mystérieux,
un petit bout de " Eire Grenn", apporté par le vent
oublié dans le temps........
Souvenez-vous c'était ICI
....Je vais vous raconter !
Il y a déjà très longtemps que les Korrigans sévissent les soirs de pleine lune sur la lande bretonne. Ce qui est un peu moins courant c’est qu’ils viennent désormais, jusque dans nos jardins. Un peu avant l’arrivée du printemps, ils ne tiennent plus en place dans l’antre de la terre. Leur seule idée fixe étant désormais de s’échapper pour fêter l’arrivée des beaux jours en dansant toute la nuit de folles farandoles.
Quelques jonquilles fébriles s’en souviendront longtemps.
Tout a commencé il y a quelques jours par la visite d’un voyageur égaré. Il portait longue houppelande et chapeau feutre délavé. Ses bottes de cuir fauve, crottées à mi hauteur, trahissaient à elles seules, ses nobles origines.
Il s’arrêta un instant, me demandant son chemin…
- Ker-ar-koad ?
- La maison de bois ? Non je ne connais pas. Ce n’est pas ici Monsieur.
L’éclat étrange de ses yeux verts, me subjugua un instant. Mais, bien vite, il se détourna et reprit sa route sans dire un mot. Tandis qu’il s’éloignait, je songeais à cet étrange voyageur. Il semblait si peu en accord avec l’espace temps, présent.
Venu de nulle part, il n’allait nulle part.
Il me laissait une drôle d’impression, à la fois fascinante et inquiétante. Je pris soin toutefois, de refermer à clef la porte derrière moi.
La soirée ne fut troublée par aucun événement et c’est l’esprit serein que je me couchais ce soir là.
Mais, dans la nuit, mon sommeil fut cependant agité par d'étranges bruits sourds venus d’on ne sait où. Je rêvais éveillée, était-ce mon imagination ou quelques faits surnaturels se déroulaient aux alentours.
J’entendais comme un martèlement sourd, saccadé presque endiablé. C’était sans nul doute les rafales de vent dans les rares arbustes de la lande toute proche. Cette pensée me rassura, et je m’endormis.
Le jour se levait. La journée s’annonçait belle et sereine. Je disposais sur un petit plateau café et tartines, me promettant de déguster un petit déjeuner sous la pergola. Le fond de l’air bien qu’un peu frais, invitait à la détente.
Sur le pas de la porte, mon regard fut aussitôt attiré par le parterre de jonquilles. Elles illuminaient l’espace, se mélangeant aux jacinthes sauvages, blanches.
Mais grand dieu ! Que c’était-il passé ?
Quel chien errant avait ainsi saccagé le jardin ?
Je posais là, mon plateau et c’est en maugréant que je constatais les dégâts. Tout un côté couché, piétiné….Quel monstre avait bien pu s’acharner ainsi sur d’innocentes fleurs ?
Tandis que je coupais quelques malheureuses, j’entendis un léger cri. Je relevais la tête, ne voyant rien aux alentours, je me remis à cueillir les plus abimées. Un autre petit cri attira mon attention. Et là sous trois jonquilles coupées, j’aperçu quelque chose de vert.
Intriguée, je soulevais les fleurs.
Incroyable, c’était tout simplement incroyable.
Un bandeau brodé gémissait de douleur.
- Merci, ces horribles fleurs pesaient si lourd sur mes jambes.
Je ne comprenais rien, mais en regardant de plus près le bandeau brodé, une surprenante idée me traversa l’esprit…. Le voyageur perdu, il avait le même regard. Ce vert étrangement métallisé, qui m’avait tant intrigué…Etait-ce possible ? Et puis, un bandeau qui parle ce n’est pas si courant.
Sans chercher à en comprendre plus, je ramassais l’étrangeté pour la placer dans le plateau. Pendant que tranquillement je buvais mon café, déjà un peu froid, j’écoutais le récit extraordinaire du malheureux.
Il était magicien et un peu sorcier de surcroit, il s’appelait « Eire Green » et il venait d’Irlande pour visiter son ami qui habitait depuis peu à Ker-ar-koad. Tous deux devaient participer au grand congrès des druides.
Mais il n’est jamais arrivé.
Cette nuit, tandis qu’il dormait au pied d’un arbre, non loin d’ici, il fut surpris en plein sommeil par les Korrigans. Ils l’obligèrent à danser toute la nuit au son d’un violon, l’emportant dans un rythme insoutenable, jusqu’à épuisement. Et s’ils l’avaient transformé de cette façon, c’est qu’il avait refusé de les amener à cette réunion secrète où seuls les grands druides celtes, siègent. Les Korrigans l’avaient abandonné ensuite, dans mon jardin, piétinant sauvagement le parterre, avant le levé du soleil.
Il ne restait de lui que ce bandeau brodé.
Un Bandeau magique indestructible, intouchable, qu’il tenait de son arrière-arrière-grand père, le " Grand Merlin " et qui, heureusement que les Korrigans l’ignoraient, servait de passeport à cette réunion secrète.
Mais qu’allez-vous devenir, maintenant ? Demandais-je, curieuse.
Ne vous inquiétez pas, avant d’être transformé, j’ai envoyé un message à mon ami. Il partira à ma recherche et me retrouvera. Il suffira de quelques herbes magiques pour retrouver mon apparence. Il viendra très bientôt….Laissez-le entrer, juste un instant. En attendant, je vais me reposer un peu, la route sera longue.
Et c’est ainsi que j’installais délicatement « Eire Green » sur une nappe de dentelle où il s’endormit aussitôt.
Dans la matinée, un étrange passant, s’arrêta devant mon portail, me salua et entra en silence. Il prit le bandeau brodé, le déposa à terre, le saupoudra d’herbes scintillantes. Une brume verdâtre se forma peu à peu d’où émergea bientôt mon voyageur perdu.
Après une accolade, ils reprirent leur chemin.
Un dernier signe de la main, un adieu à jamais, ils s’éloignaient déjà.
Je revenais vers la maison et à ma grande stupéfaction, les jonquilles pimpantes se doraient au soleil. Plus de trace de piétinement, le sortilège était levé.
Il ne restait rien de cette étrange nuit…..rien !
Sauf une petite frange verte sur la dentelle de ma nappe.
Yvonne Delisle
Bonne journée